dimanche 2 mars 2014

23 Décembre - Puerto Williams

Départ à 9h.

Je n'arrive pas à croire que j'ai payé 75 euros pour traverser la frontière en bateau de Ushuaïa à Puerto Williams dans un bateau particulièrement lamentable où on se prend toute la flotte.
Pour info, Ushuaïa, qui fait partie de l'Argentine, est dite "ville au bout du monde", ce qui fait son tourisme, mais techniquement c'est Cabo de Hornos, sur l'île de Puerto Williams, qui fait partie du Chili, qui est vraiment dernière ville du monde.

Arrivés là-bas, je me rends compte qu'il fait extrêmement froid, et j'appréhende encore plus les 5j qui vont suivre.
On prend un bus jusqu'à Cabo de Hornos, d'où commence le trekking Los Dientes.
On pose la plupart de nos affaires dans un hostal, on va prévenir la police que si on revient pas dans 5j, c'est parce qu'on s'est fait mangé par des castors*, et on y va, les sacs bien plus légers - pour moi en tout cas, les gars se sont repartis la nourriture pour 5j pour que je porte pas trop de poids, sympa non?

Au début du trekking on à le choix entre deux chemins pour accéder au camping spot, ou par en haut, donc plus dur mais bien plus impressionnant, ou par en bas, par la vallée, moins difficile -du moins c'est ce qu'on croyait- mais plus boueux. Ce qui à créé un débat enflammé entre Peter et Quentin pour savoir lequel j'emprunterai. Au final, on se sépare, Quentin par en haut, Peter et moi par la vallée.

J'essaie de suivre le rythme de Peter comme je peux, mais c'est très difficile pour moi, et la boue, oh mon dieu la boue. Ma pire ennemie durant ces 5j. Au bout d'une heure de marche, j'ai déjà envie de pleurer parce que je me suis débattue 5 fois avec des lianes et que je suis tombée 12 fois dans la boue. Mais je veux prouver que je peux le faire, donc je me force. On se perd plusieurs fois, il se met à neiger, une vraie tempête de neige. Je n'en crois pas mes yeux, je pensais pas vivre ça un jour. J'avance tellement lentement à cause de mon sac qu'une demie heure avant la fin, Peter décide de porter mon sac en plus du sien. Je vous raconte pas le souvenir que j'ai de Peter à ce moment là, avec un sac de 20 kilos devant, un de 10 derrière, et qui crie avec une grosse voix "WATCH OUT VI, IT'S SLIPPERY". J'ai la vision d'un barbare qui me vient à l'esprit quand j'y repense.


J'arrive au camping spot -qui n'en est pas vraiment un, c'est seulement le Lonely Planet qui en conseille certains parce que le terrain est adapté- frigorifiée et totalement démotivée. C'est ça, les trekkings dans la nature? 
J'ai de la boue jusqu'aux genoux, mes chaussures sont trempées, j'ai froid, j'ai mal partout, et il n'y a rien ici qui pourra me réconforter. Mon sac de couchage à la limite, mais avant de se glisser dedans il y'a pleeeeeeeeein de trucs à faire.


D'abord, trouver un endroit relativement plat où planter la tente, ensuite ESSAYER de l'installer, mais avec le vent ça se défait toutes les 30 secondes. Ce jour là ils ont mis un temps fou à installer les deux tentes pendant que j'étais assise en boule dans un coin à rêver de ma cheminée en Bretagne.

Quand ce grand cap est passé, on va dans la tente, et on se lave avec des lingettes pour bébé (idée qui nous vient de Mélanie il me semble, pour se laver aux Vieilles Charrues, et que Peter à estimé invention pour trekkeurs la plus ingénieuse de l'année), ce qui personnellement me prend beaucoup de temps vu que je suis roulé en boule pour tenter de me réchauffer.


Ensuite on mange, et comme les gars ont intelligemment prévu de faire des repas chauds pendant que je pensais pouvoir survivre en mangeant des sandwichs au thon tous les jours; on doit aller à la tente high-tech de Quentin pour cuisiner à l'abri du vent. Et vu les endroits potentiellement campables (ça ne se dit pas mais ça se comprend), elle peut être assez éloignée, en tout cas suffisamment éloignée pour qu'on ait les pieds gelés - littéralement gelés le temps de s'y déplacer en tongs. 

Arrivés dans la tente je passe bien 5 minutes à chaque fois avec mes mains autour de mes pieds à tenter de les réchauffer comme je peux. On allume le gaz, on attend que l'eau boue, on met les pâtes, et tout le tralala.
Ca fait des semaines que Peter me parle du plaisir suprême de manger chaud dans ta tente après une journée comme ça. J'ai du mal à le croire, jusqu'à je me rende compte que ce que je mange (pates + sauce tomate ¨+ parmesan) est le comble du délice, et que je suis réchauffée. Aaaaaaaah. Je comprends maintenant.

Ensuite, il faut sortir de nouveau, puis faire la vaisselle dans l'eau du lac, qui est aussi froide que tout le reste, et enfin tu peux te fourrer dans ton sac de couchage, qui, soit dit en passant est le plus chaud du monde ( jusqu'à -7 degrés hé) et KIFFEY TA RACE.

Ça, c'est à peu près le même scénario tous les soirs, et croyez moi, ça me paraît un effort surhumain. Mais ça fait un bien fou.

J'ai l'air d'avoir chaud, hein?

*Pour l'anecdote, sur l'Isla Navarino où on fait le trekking, les castors et leurs cousins ont décidé de s'y installer en masse et détruisent toute la nature pour se faire des maisons (tiens, ça me rappelle vaguement quelque chose...). Donc leur invasion est très mal vu, et au contraire d'une espèce en voie d'extinction, ils sont une espèce non-désirée et qui normalement n'a rien à faire ici. Ils en tuent donc régulièrement, et on à le droit de les tuer aussi, même si on ne l'a pas fait évidemment.
Moi aussi ça m'a paru cruel au début, mais quand tu vois le carnage qu'ils font, tu comprends.
Mais alors je pose la question : pourquoi quand les humains détruisent la nature pour construire des maisons c'est légitime, mais quand ce sont des castors il faut les tuer ? Vous avez 4h.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire